Aller au contenu
Accueil » Entretenir le devoir de mémoire

Entretenir le devoir de mémoire

19.10.11_paves_de_la_memoire_2.jpg
Ce 11 octobre a eu lieu l’inauguration d’un « Pavé de la mémoire » en hommage à Richard Altenhof, résistant, héros de guerre. Une manifestation organisée en collaboration avec l’Association pour la mémoire de la Shoah et la Fondation Auschwitz.
L’Association pour la mémoire de la Shoah (AMS) veille, par diverses actions et publications, à la transmission de la mémoire du crime de génocide contre les communautés juives et tziganes et des faits de résistance en Belgique. Depuis 2009, l’association a relayé en Belgique le projet « les Pavés de la mémoire » (Stolpersteine) initié par l’artiste allemand Günter Demnig. Les « Pavés de la mémoire » rendent hommage aux victimes du régime nazi. Les pavés est sont placés devant la dernière demeure de celles et ceux qui ont perdu la vie lors de la Seconde guerre mondiale.
Plus de 50.00 pavés ont déjà été placés dans 18 pays, dont plus de 400 en Belgique.
La cérémonie a eu lieu en présence de l’artiste Günter Demnig, d’étudiants d’une école secondaire de la commune, et de membres des autorités communales : le Bourgmestre Olivier Maingain et les membres du Collège : Isabelle Molenberg, Michèle Nahum, Eric Bott et Philippe Jaquemyns. Le Collège est en effet très attentif à maintenir vivace le devoir de mémoire et à honorer la mémoire de celles et ceux qui ont lutté pour la défense de nos droits démocratiques et de nos libertés.

Discours du bourgmestre Olivier MAINGAIN à l’occasion de la pose d’un « Pavé de la mémoire » en hommage à M. Richard Altenhof, devant son dernier domicile rue de la Cambre à Woluwe-Saint-Lambert

Le Collège de Woluwe-Saint-Lambert est très attentif à maintenir vivace la mémoire de celles et ceux qui ont lutté pour préserver nos droits démocratiques et nos libertés lors des conflits armés, notamment lors de la Seconde Guerre mondiale. Nous veillons aussi à ce que personne n’oublie l’horreur que le régime fasciste nazi a fait subir à des millions de personnes, procédant à leur génocide, du simple fait de leur nationalité, de leur appartenance philosophique, communautaire ou politique.

Je remercie l’association pour la Mémoire de la Shoah et la Fondation Auschwitz, initiatrices de cette cérémonie qui, par la pose d’un Pavé de la mémoire rend hommage à Monsieur Richard Altenhof, héros de la résistance belge, qui habitait au n° 138 de la rue de la Cambre.

Ingénieur polytechnicien, actif au sein du Cercle du Libre examen de l’Université libre de Bruxelles, Richard Altenhof s’engage, dès 1942, dans la résistance. Il est l’un des fondateurs du Groupe G, réseau de résistance spécialisé dans les sabotages.

Souvenons-nous que c’est le Groupe G qui commit l’attaque contre le XXe convoi qui transportait des prisonniers juifs au départ de Malines vers le camp d’Auschwitz.
En avril 1943, trois hommes arrivent, avec une simple lampe-tempête couverte d’un chiffon rouge posée sur les rails, à immobiliser ce convoi de prisonniers en rase campagne. Ils parviennent à ouvrir un wagon plombé, permettant ainsi l’évasion d’une vingtaine de prisonniers. Plus de 200 autres prisonniers pourront également s’échapper au cours du trajet. C’est un fait unique dans l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, puisque c’est le seul convoi ferroviaire qui ait été intercepté par des résistants.

Monsieur Altenhof fut arrêté le 3 juillet 1943, pour avoir participé à la préparation de l’attaque du XXe convoi. Il est incarcéré au fort de Breendonk où il sera torturé. Il est fusillé au tir national à Schaerbeek le 30 mars 1944, à l’âge de 24 ans.
Je vous lis un extrait de la dernière lettre qu’il adressa à sa mère :
« …Maintenant c’en est fait ; je suis battu mais nullement abattu. Et sois tranquille, ils n’auront pas la satisfaction de me voir trembler. Maman, des centaines de milliers de soldats sont morts dans cette guerre : dans quelques heures je serai l’un d’eux. Je supporte allègrement ces heures-ci, parce que je sais que vous êtes courageux et que votre moral restera ferme. Et je veux que le jour de la victoire vous vous réjouissiez de tout cœur. Sache que je ne regrette pas ce que j’ai fait ; je regrette seulement de m’être laissé prendre… »

Cette hommage a une résonnance particulière, car nous avons déjà honoré la mémoire de Monsieur Robert Maistriau, ancien habitant de la commune qui fut, lui aussi, membre du réseau de résistance Groupe G et qui participa activement à l’attaque du XXe convoi.

Il est de notre devoir de démocrates de veiller à ce que, jamais, le souvenir des atteintes atroces à la dignité humaines qui ont été commises au nom de l’idéologie fasciste nazie ne soient oubliées, afin que les théories négationnistes ne parviennent pas à occulter la réalité historique.
On ne peut accepter, dans un pays démocratique comme le nôtre, que des responsables politiques puissent fermer les yeux sur les actes odieux commis par les citoyens qui ont collaboré aidant par la même au génocide commis.

Il est tout aussi insupportable de savoir que, depuis des dizaines d’années, les collaborateurs du régime nazi en Belgique ont pu bénéficier d’une forme de retraite de l’état allemand avec indemnités sonnantes et trébuchantes.
J’ai été amené à dénoncer ce scandale à la tribune du Parlement belge et j’ai obtenu des partis démocratiques qu’ils adoptent une résolution invitant la République démocratique allemande à donner des explications et à mettre fin à ce régime de faveur dont bénéficient les traitres. J’espère que cette résolution sera suivie d’effets.
N’en déplaise à ceux qui osent affirmer « que les collaborateurs avaient leurs raisons », nous ne pourrons jamais accepter qu’ils bénéficient d’une quelconque reconnaissance car ce serait la perpétuation de la trahison, la perpétuation de l’atrocité subie par les femmes et les hommes qui ont eu le courage de les combattre.

En cette période où, à nouveau, des courants politiques cherchent à imposer à l’Europe le reniement des valeurs démocratiques et des libertés fondamentales, nous ne pouvons nous résigner à accepter de nouvelles lâchetés.
Au contraire, l’Europe ne sera respectée et grande qu’en restant la garante universelle de la dignité humaine et en osant dénoncer tout manquement aux valeurs humanistes et citoyennes qui forment son socle fondateur.

Je tiens enfin à remercier Monsieur Gunter DEMNIG, artiste allemand, concepteur et réalisateur des Pavés de la Mémoire pour sa présence aujourd’hui. Nous en sommes très honorés.

Olivier Maingain
Bourgmestre de Woluwe-Saint-Lambert

Partager cet article